samedi 28 juillet 2012

Olivier G.Boiscommun, deux mesures d'inspiration

Choisir d'arrêter les "Trolls" en plein succès, adapter "Pietrolino" de Jodorowsky, se consacrer à ses propres créations BD : l'audace d'un auteur entier.


Troll T2 - Boiscommun/Sfar/Morvan
© Delcourt - Boiscommun/Sfar/Morvan
Entretien avec l'auteur (scénariste, illustrateur et coloriste) de bande-dessinée : Olivier G.Boiscommun

BD : Sur les "Trolls", vos talents d’illustrateur ont participé au succès de la série, comment se fait-il que vous ayez arrêté votre collaboration après le 3e volume ? Lassitude, surcharge de travail ou simple envie de passer à autre chose ?

Il aurait été beaucoup plus facile et lucratif de continuer la série "Troll" tout au long de ma carrière, faire un album chaque année être riche et arrivé puis m'éteindre progressivement dans une routine passive. J'ai préféré préserver le feu qui nourrit mes productions et qui est sans cesse ravivé par de nouveaux projets.

Beaucoup de monde aurait apprécié que je continue "Troll", car la série marchait bien, mais alors, "Halloween", "L'histoire de Joe", "les livres de Jack et Sam", les "Anges" et




"Pietrolino" n'auraient jamais vu le jour. Alors qu'ils ont

apporté eux aussi, pour certains un vrai succès commercial et je l'espère pour tous un travail méritant et honnête, qui donnent à leurs lecteurs, un moment de plaisir, une réflexion, ou simplement de se sentir moins seul l'espace d'un instant.

C'est dans cette optique que je travaille chaque jour et que je défends chacun de mes projets. Même si à chaque fois,
je dois probablement décevoir des lecteurs de ne pas continuer la série qu'ils ont aimé et choisi.

Mais que ceux qui suivent "La Cité de l'Arche" se rassurent, si l'on m'en donne les moyens, beaucoup de choses sont dors et déjà écrites, pour enrichir par la suite, les quatre albums déjà programmés.

BD : Vous dites votre plaisir à vous évader dans des univers différents en illustrant des scénarios d’autres auteurs, mais vos projets solos fonctionnent sur une recherche entre dimension intimiste et efficacité de la narration. Quel est le secret de ce dosage à la Boiscommun ?

Le fait de travailler seul m'apporte une grande liberté sur la gestion, "le dosage", de ce que je choisi de raconter à travers mes histoires ainsi que la manière dont je vais m'y prendre pour le faire.

C'est un travail d'équilibriste ou je m'emploie à rester sur le fil, de ne pas trop en dire, ni trop vite, afin que chaque chose ait le temps de faire son chemin personnel dans l'esprit de chaque lecteur et qu'il puisse s'approprier l'histoire et créer des liens avec ce qui fait écho en lui. Mais aussi précis, afin que rien ne manque a la compréhension de l'histoire et de son déroulement. De surprendre également afin qu'aucune routine ne s'installe, aussi bien dans la mise en page que dans les cadrages, mais sans rupture brutale qui pourrait faire décrocher.

Je prends soin de réfléchir chaque chose et tout ce qui est posé a été préalablement pensé, analysé et testé.

BD : Dans votre bibliographie (hormis des titres comme les "Trolls" plus humoristiques) on sent votre goût pour la poésie du mot et des thèmes humanistes. L’intime est-il pour vous indissociable de la démarche « artistique » ? D’où vous vient cette sensibilité perceptible dans vos livres en solo aussi bien que dans vos choix de collaboration… ?

Curieusement, malgré sa différence marquée avec le reste de ma production, dans la série "Troll", je crois sans que nous n'en ayons jamais réellement parlé ensemble, que c'était ma part d'apporter cette sensibilité et cette poésie à travers le dessin. Nous venions avec Jean-David Morvan et Joann Sfar, sans avoir chacun encore fait grand chose à l'époque, de trois univers très différents de la bande dessinée et il me semble que c'était ces différences qui faisaient toute la richesse et l'originalité de cette série.

Pour "Pietrolino", j'ai eu le sentiment très fort à la lecture de cette pièce de mime d'Alejandro Jodorowsky qu'elle avait été écrite pour moi. Je me suis senti très proche du personnage principal, de sa sensibilité et de ses souffrances, j'ai été très touché par son destin. C'est pour cette raison que j'ai souhaité en faire l'adaptation. J'ai essayé pour mieux le connaitre de pénétrer son intimité comme je le fais pour mes propres histoires. Ensuite, j'ai écrit des dialogues qui correspondaient à ce que je pensais connaître de lui, de la manière dont il vit ses passions et son art.

Que ce soit avec "Pietrolino", "Halloween", "L'histoire de Joe" ou encore "
La Cité de l'Arche", il me parait évident que c'est un moyen de parler des choses qui me concernent et qui me touchent. Parler de la mort, de la vie, du pouvoir et de ceux qui y ont succombé, des souffrances qu'il engendre, de la beauté du monde, du destin ou des conséquences de nos choix,etc... C'est bien évidemment parler de moi et de ma perception des choses.

Écrire des histoires, n'aurait aucun sens, s'il n'était pas question de les investir de sa personnalité, son expérience, sa vision du monde. Sans cela, nous aurions tous les mêmes choses à raconter et en toute logique elles n'intéresseraient personne. A mon sens, l'intime est pour moi indissociable de la démarche d'écrire, chacun le fait avec ce qu'il est et ce qui le compose, c'est également grâce à cela que la bande dessinée est aujourd'hui aussi riche et variée.

Tout l'entretien avec Olivier G.Boiscommun :

1ere partie :
une mesure de bande dessinée
3e partie : trois mesures de technique

4e partie : quatre mesures d'éléments narratifs

5e partie : cinq mesures de talent

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